Droit à la déconnexion oui, mais est-ce si facile de déconnecter ?

Depuis 2017, le droit à la déconnexion vient nous rappeler une chose essentielle : le temps libre, c’est sacré. Mais dans les faits, est-ce qu’on arrive vraiment à déconnecter ?
Instauré par la loi Travail du 8 août 2016 et promulgué en 2017, le droit à la déconnexion protège les salarié.es contre les sollicitations professionnelles en dehors de leurs horaires de travail, en particulier via les outils numériques.
En théorie donc, finis les mails à minuit, les appels pendant les congés, ou les messages “urgents” le dimanche. Malheureusement, le cadre est encore flou et beaucoup de collaboratrices et collaborateurs peinent à décrocher après le travail.
Une hyperconnexion persistante et mal régulée
Les chiffres le confirment : 73 % des salarié·es européens déclarent être dérangés hors de leurs horaires de travail par leurs collègues, et 67 % par leur manager. Dans la pratique, ce ne sont pas uniquement les lois ou les chartes qui déterminent si les salarié·es parviennent à se déconnecter correctement, mais surtout la façon dont l’entreprise fonctionne au quotidien.
Même pendant les vacances, près d’un quart des salarié·es continuent à consulter leurs mails professionnels. Résultat : la frontière entre vie pro et perso devient de plus en plus floue… et parfois inexistante.
Par ailleurs, ce flou est souvent renforcé par l’absence de cadre clair en entreprise : d’après un rapport Eurofound de juin 2023, plus d’1 salarié européen sur 2 travaille dans une structure sans politique de déconnexion organisée.

Répercussions juridiques : quand la loi sert de recours
Pourtant le droit à la déconnexion n’est pas juste un concept ou une tendance RSE. C’est un droit inscrit dans la loi. Et quand il n’est pas respecté, il peut y avoir des conséquences pour l’entreprise.
Exemple marquant : en avril 2024, un cadre a obtenu plus de 65 000 € d’heures supplémentaires après avoir été constamment joignable pendant ses déplacements à l’étranger. La cour a requalifié ce temps comme astreinte, donc comme temps de travail effectif.
Ce genre de décision envoie un message clair : le droit à la déconnexion ne peut pas rester théorique.
Quelles bonnes pratiques en 2025 ?

Heureusement, certaines entreprises s’emparent du sujet et instaurent quelques bonnes pratiques :
- Rappeler à leurs managers de ne pas contacter les équipes en dehors des horaires de travail.
- Mettre en place des outils pratiques : programmation différée des mails, alertes de déconnexion, ou encore plages horaires clairement définies.
Mais dans les faits, seulement 23 % des entreprises mentionnent le droit à la déconnexion dans leurs offres d’emploi et en font un pilier de leur politique RH. Un signal fort pourtant simple pour poser les bases dès le départ…
Pour les travailleurs indépendants, la tâche est encore plus complexe. Faute d’un cadre bien établi, près de 50 % travaillent les soirs et week-ends sans bénéficier du repos quotidien et hebdomadaire dont devrait pouvoir jouir tout travailleur.
Culture d’entreprise : le moteur essentiel de la déconnexion
En fait, le respect du droit à la déconnexion repose avant tout sur une culture d’entreprise éthique, plus que sur une règle juridique pure. Il s’agit donc de penser des organisations de travail qui évitent leur surmenage, d’éviter tout contact lié au travail en dehors des horaires officiels de travail et de montrer l’exemple au sommet de l’organisation.
Le droit à la déconnexion en 2025 est bien inscrit dans la loi, mais pour être effectif, il doit passer du cadre formel à une vraie culture d’entreprise respectueuse des temps de repos. Il ne doit pas être perçu comme un frein à la performance, mais comme un pilier du bien-être au travail.
Car déconnecter, c’est offrir à chacun la possibilité de revenir au travail plus reposé, plus motivé, et plus engagé.